Interstellar

Interstellar est un OVNI mais sans doute pas celui que nous attendions.

 

Nous suivons les turpitudes d’une famille de farmers de l’Ouest américain qui subit de plein fouet les aléas climatiques et naturels : tempêtes de sable à répétition, manque d’oxygène. On assiste, impuissant, au déclin de notre planète. Elle a beau nous avoir vus naître, elle devient hostile. Dans ce contexte apocalyptique, l’humanité a besoin d’un héros. Ce sera Matthew McConaughey. Il prend part à une mission secrète de la NASA qui cherche à localiser de nouveaux sites habitables pour que l’espèce humaine pérennise (dans des galaxies lointaines, très lointaines).

Le début du film – relativement lent – plante le contexte et nous fait accepter l’univers dans lequel nous allons évoluer et suivre les personnages. Nous sommes plongés dans un avenir que l’on imagine proche mais dans un monde différent du notre. Plus personne ne croit au progrès qu’il soit technologique ou scientifique, seules comptent la survie et la production de nourriture. L’esprit humain est bridé : McConaughey, ancien astronaute et ingénieur, s’est recyclé dans l’exploitation agricole.

 

L’Amérique dépeinte par Nolan n’a ni âge ni visage bien qu’il revisite son histoire et notamment le mythe des pionniers : l’Américain va plus vite et plus loin que les autres, il défriche de nouvelles terres, habite de nouveaux territoires et plante son drapeau là où il s’installe. Il reste malgré tout dépendant des éléments et quand ceux-ci se déchaînent (mauvaises récoltes et poussière), il est désarmé. Ce n’est pas sans nous rappeler le Dust Bowl. Puis, Nolan aborde la conquête spatiale. D’abord niée, on se rend vite compte qu’elle seule peut sauver l’humanité en lui fournissant un nouveau foyer.

 

A monde nouveau, homme nouveau. Mais restent à définir les bases sur lesquelles cette humanité va se fonder et les valeurs qui lui seront propres. La temporalité est distordue dans l’espace, il en va de même pour les rapports humains. Les caractères se révèlent, les masques tombent, les mensonges éclatent au grand jour. Tout au long du film, les personnages sont confrontés à des dilemmes cornéliens : revoir sa famille ou se sacrifier pour le bien de l’espèce ? Et parce que choisir c’est renoncer, en même temps qu’ils usent de leur libre- arbitre, Matthew McConaughey et Anne Hathaway signifient que l’humanité prévaut sur le sort de l’individu.

 

Pour légitimer sa place dans le monde, l’homme a recours à des mythes fondateurs et Nolan nous propose une nouvelle cosmogonie. Il n’y a plus de démiurge mais des scientifiques- explorateurs, plus d’autochtonie mais une colonisation interstellaire. A trop vouloir gagner en véracité et en réalisme, le film peine et devient hermétique à qui ne maîtrise pas ses cours de sciences : physique quantique, loi de la relativité et de la gravité. Parfois long, parfois mielleux et facile, Interstellar n’en est pas moins efficace. Nolan sait parfaitement composer son cadre, surprendre son spectateur, jouer avec les rythmes et émouvoir grâce à ses silences.

 

Jules Pouriel

 

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