The Myth Of The American Sleepover : dans les nuances de l’adolescence

 

En 2015 sortait l’enthousiasmant It Follows, teen movie horrifique qui témoignait avec sensibilité d’une certaine aridité de l’entre-deux âges. On découvrait alors le précieux regard de son réalisateur, David Robert Mitchell, dont le premier film The Myth Of The American Sleepover déployait déjà un univers à la fois discrètement irréel et d’une justesse absolue. A l’instar d’autres réussites du genre (Adventureland de Greg Mottola, ou récemment The Edge Of Seventeen de Kelly Fremon Craig), cette « légende des soirées pyjama » reste aujourd’hui encore inédite en salles.

Comme souvent, l’histoire est simple. Le dernier soir de l’été, les adolescents d’une banlieue résidentielle de Détroit se réunissent les uns chez les autres en espérant l’aventure, l’amour peut-être, ou simplement pour tuer le temps. Entre les maisons coquettes, s’engage alors un ballet nonchalant des corps guidé par les rencontres, les hésitations, les erreurs. Tous les échecs sont encaissés en silence pour continuer de tenter sa chance jusqu’à l’aube. Dans un monde sans adultes et sans enfants baigné dans une lumière rosée, le film colore ainsi autant de nuances de doute et de blessures qu’il compte de personnages attachants. De Maggie à Rob, de Scott à Claudia, il multiplie les prismes pour tenter de saisir l’insaisissable, d’approcher l’état gazeux et en constante métamorphose de l’adolescence. Le « mythe » est cependant bien moins logé dans le regard du cinéaste que dans celui de certains jeunes eux-mêmes, habités par la douleur sourde de voir s’échapper leur enfance. Quand l’un d’eux en fait part gravement au cours d’un bain nocturne, il est accueilli par un petit rire innocent. Sa confession apparait ridicule et importune car c’est ici avant tout le présent et ses promesses qui importent.

Sous ses abords cotonneux et insouciants, The Myth Of The American Sleepover parvient cependant à aborder mieux que beaucoup d’autres, les égarements adolescents, la difficulté à appréhender son désir, et le poids d’une virginité à perdre ; la sensualité frémissante et merveilleuse qui parcourt le film, ne rendant cela que plus sensible et plus incarné. Teen-movie en sourdine, aux dialogues constamment chuchotés, The Myth Of The American Sleepover est donc de ces films que l’on rêverait d’avoir fait, mais surtout de ceux que l’on voudrait pouvoir ne jamais quitter.

Mathilde Guitton