Berlinale : Dream Boat – 2/8

D’emblée, le titre du film explicite bien assez le contrat qui est à l’œuvre dans Dream Boat. Tous les ans des milliers d’hommes se réunissent à l’occasion d’une croisière de rêve, avec comme seul dénominateur commun leur attrait pour les torses musclés et les slips bien remplis (sans oublier la house music). En plein jour, on se prélasse autour de la piscine. Les soirées, quant à elles, se réinventent chaque nuit autour d’un thème précis, surpassant de loin la frénésie des full moon parties. On se déguise, on danse, on boit, on s’observe pour enfin s’abandonner aux yeux de tous jusqu’au petit matin. Tristan Ferland Milewski le suggère avec habileté : le dreamboat est un vrai baisodrome. Mais pas que.

À l’image des corps impeccables de ces charmants pensionnaires, l’esthétique du film est bien léchée, quitte à nous faire douter : est-ce vraiment un documentaire ou plutôt une fiction ? Les plans sont si parfaits qu’il semblerait que le réalisateur pratique un certain culturisme de la mise en scène. D’ailleurs, une des problématiques soulevées par Dream Boat c’est bien le culte du corps dans la communauté gay, qui tend à discriminer ceux qui seraient trop empâtés, vieux, ou « qui en auraient une petite ».

En adoptant plus précisément les points de vue de quelques passagers, le documentaire se fait l’écho de leurs histoires individuelles, leurs drames familiaux, mais aussi leurs attentes. Certains sont en quête d’une rencontre amoureuse et d’une vie qu’ils considèrent comme « normale », d’autres veulent juste partager un peu de joie de vivre. Si bien que Dream Boat dépasse très vite l’apparente futilité de son sujet en touchant là où ça fait mal, et en nous touchant nous. N’en reste pas moins le génie burlesque de beaucoup de scènes qui nous arracheraient des larmes de rire. Avec une bonne dose d’autodérision et de légèreté, Tristan Ferland Milewski signe un très beau compromis entre émotion et hilarité.

Paola La Mantia