Sound of noise – Entretien avec le producteur et co-scénariste Jim Birmant

Comment est né le projet de Sound of noise ?

Sound of Noise est, à l’origine, un court-métrage. Est arrivé le projet d’en faire un long-métrage, mais il manquait des financements. J’ai toujours été passionné de cinéma. Lorsque j’ai pris connaissance de ce projet, j’ai tout de suite voulu en faire partie. Je n’avais pas de boîte, aucune structure sur laquelle m’appuyer. Mais j’ai voulu le produire absolument, même si le suédois pouvait en rebuter certains.

 

De quelle façon vous y êtes-vous pris ?

Je me suis rendu à Cannes, et j’ai dit à l’équipe qui cherchait des producteurs que je voulais faire du cinéma, et qui si ce n’était pas ce film, alors ce n’en serait aucun. J’ai effectué un véritable forcing. En parallèle, j’ai monté ma boîte et cherché des partenaires pour co-financer la production.

 

Comment le passage du court au long-métrage s’est-il fait ?

A l’origine, personne ne pensait qu’il était possible d’en faire un film, notamment car il n’y avait pas vraiment de scénario. On a donc énormément travaillé cet aspect. Le scénario final aura mis deux ans à être rédigé. On m’a, en plus du statut de producteur, donné le crédit de co-auteur car l’équipe était incapable d’écrire l’histoire. Le scénario était bien trop conceptuel. J’avais une idée de départ, et de ce fait il m’a été facile d’écrire le scénario : on m’a apporté un univers, j’ai juste eu à appliquer ma créativité. Je me suis dit que j’allais faire une histoire classique, qui suit les étapes habituelles d’un polar, mais sans arme et avec de la musique.

Face au gang du court-métrage, nous voulions vraiment faire un film policier. On s’est dit : « Si les mecs au lieu d’attaquer un appartement attaquaient une ville ? ». Ce qui fait un bon film policier, ce n’est pas le crime, mais le policier confronté à ses démons. On lui dit de ne pas faire quelque chose mais il la fait quand même. C’est précisément ce qui se passe pour Amadeus, à l’exception que son démon à lui, c’est qu’il déteste la musique.

Exprimer des émotions par le visuel est toujours difficile mais on a été à l’essentiel : réaliser un travail de clarté, de simplicité. L’idée, c’était le trajet d’Amadeus. Comment pouvait-il faire la paix avec son frère ? Le trajet d’un personnage, ses émotions, c’est le plus important.

 

Parlez-nous du travail sur le son…

Les personnes qui ont travaillé sur le son sont toutes de véritables professionnels, des stars dans leur domaine. Ils ont travaillé pour les plus grosses productions hollywoodiennes. Les meilleurs de la profession. Quand on leur a soumis le projet, ils n’ont pas hésité une seconde, ils l’ont même considéré comme le film de leur vie car étant sur le son. Ce sont plus des artistes que des réalisateurs de cinéma.

Tous les sons sont authentiques. Ce fut une lourde tâche. Par exemple, ils ont fait le tour de la Suède, pour trouver le bon lit d’hôpital, celui qui produirait le son parfait. Ils ont aussi utilisé un son capté en Papouasie, d’une tribu qui fait des bruits sous l’eau… A la base il y avait dix-sept séquences, mais on n’en a gardé que six. Le travail sur le son a été très long.

 

Et pour la scène dans la centrale électrique, comment vous-y-êtes vous pris ?

Le son des câbles sans électricité est celui d’un lac qui dégèle au Canada. Je vous l’ai dit, les types qui ont travaillé dessus sont des dingues; ils vont chercher des sons aux quatre coins du monde. Pour la ville, les sons sont d’origine électrique (proviennent de centrale, etc.).

 

Le montage a-t-il été difficile ?

Très. En plus de l’aspect musical, et du côté polar, il y avait aussi dans la réalisation une volonté de faire rire qui était présente. Les scènes sur les câbles ont été faites en studio. Quant à la ville, on a utilisé pleins de plans pour la reconstituer, puis on a rajouté des immeubles car il n’y avait pas du tout de skyline dans la ville de tournage.

 

Et le financement ?

          Sound of noise est arrivé à un moment où tous les prix ont été divisés par deux, à cause de la crise. Le budget était de trois à quatre millions d’euros : à l’époque c’était peu, mais aujourd’hui cela représente beaucoup. J’ai été voir le SFI (le CNC suédois) pour leur expliquer que c’était très important, que ce film deviendrait part entière du patrimoine suédois. Ils ont investi un million dedans. Mais au fil du projet, plusieurs investisseurs m’ont lâché. Actuellement, je suis toujours endetté.

 

On peut voir une référence à Fight Club, dans la scène finale.

Absolument pas. Mais avec le temps, il y a plein de clins d’œil qui surgissent, sans que l’on ne s’en soit rendu compte au moment de l’écriture.

 

Quel accueil le film a-t-il reçu ?

Le film est sorti en 2010, après quatre ans et demi de travail. L’accueil fut très positif, le film a même été à Cannes. Il a eu un très gros succès en Corée, en Pologne, en Russie… Par contre, ce fut un gros échec en Suède. Mais il jouit d’une véritable fanbase dans le monde. C’était un véritable rêve pour moi.

Ce qui est intriguant dans la réception de Sound of noise, c’est qu’il a suscité des interprétations très diverses, notamment en ce qui concerne le personnage principal, Amadeus, et sa surdité sélective. A vrai dire, si cet élément du scénario et son fil conducteur étaient dès le début présents dans nos esprits, l’aspect le plus important demeure la musique et le travail sur les sons. Le scénario n’est pas un prétexte mais ne vient qu’appuyer le thème majeur du film, la musique.

 

Allez-vous réitérer l’expérience cinématographique ?

Oui. Je suis actuellement co-auteur d’un film qui va bientôt sortir en Inde. J’aimerais vivre du cinéma mais en participant à la création. Quand à Sound of noise, un remake américain est prévu avec la BO d’Aerosmith et l’un des scénaristes de Borat.

J’ai toujours adoré le cinéma. Avant, je bossais dans la pub. Dès vingt-cinq ans, j’étais producteur, je voyageais aux quatre coins du monde pour des tournages. Je ne voyais jamais rien des lieux paradisiaques sur lesquels je me rendais. J’étais en recherche de sensations fortes. Ma drogue, c’était l’adrénaline. Puis j’ai failli mourir en parachute, cela m’a fait réfléchir. J’ai voulu donner un autre tournant à ma vie. Je gagnais énormément d’argent. J’ai tout investi dans Sound of noise. Aujourd’hui, je ne me souviens même plus de toutes les pubs que j’ai faites. Mais dans cinquante ans, Sound of noise sera toujours mon film, mon travail. C’est mon bébé, j’en suis très fier.

 

Fiona Chalom

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