Le jour et la nuit : Midnight Special

 

Dans une chambre à la lumière tamisée et aux portes et fenêtres barricadées, deux hommes sont prostrés devant la télévision, la mine sombre. La photo de l’un deux est diffusée aux informations, l’accusant de l’enlèvement d’un enfant. Dans la même pièce, un petit garçon avec des lunettes de plongée sur les yeux lit confortablement des comics à l’aide d’une lampe torche, caché sous un drap. Très vite, les deux hommes se lèvent, l’entraînent avec douceur dans une voiture, et démarrent en trombe dans la nuit noire. Une musique oppressante commence, le titre apparaît.

Si cette critique ne fait qu’expliciter la première minute du film, c’est parce qu’un synopsis, même tout à fait sommaire, du scénario général, ne ferait que gâcher son caractère mystérieux. Jeff Nichols, le réalisateur de ce petit diamant brut, s’était déjà fait remarqué avec deux films qui ont déclenché controverses et polémiques chez les critiques et les cinéphiles : Mud et Take Shelter. Entre les atmosphères lourdes, les acteurs au jeu si subtil qu’ils en paraissent impassibles, les histoires incomplètes et la lenteur de la progression scénaristique, les avis ne pouvaient être que partagés.

Midnight Special est aussi caractérisé par cette réalisation toute particulière qui semble être la patte de Jeff Nichols. L’ambiance réussie, aidée par une bande-son classique mais efficace, aiguise la curiosité du spectateur. De plus, le jeu certes cliché entre le jour et la nuit, l’ombre et l’obscurité, participe aussi à instaurer un suspens diffus Si on peut reprocher aux dialogues d’être un peu insipides, on ne peut qu’applaudir le talent de tous les acteurs qui parviennent à faire passer émotions et paroles dans des regards lourds de sens. Le scénario quant à lui est malheureusement un peu faible et se fait le défaut principal de ce film autrement tout à fait satisfaisant. Très rapidement prévisible, Midnight Special ne parvient pas à faire durer le mystère et son final un peu décevant n’est pas à la hauteur de sa magistrale première moitié.

À voir donc, rien que parce tout ce que réalise Jeff Nichols mérite le coup d’œil, mais il ne faut pas s’attendre au chef d’œuvre de l’année.

Adeline Méheut