« Le downsizing, c’est d’abord se sauver soi même »

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Le projet Downsizing voit le jour dans la tête de son réalisateur en 2006. Lorsque l’on parle à Alexander Payne de Chérie j’ai rétréci les gosses pour le comparer à son film, il préfère dire qu’il s’est « détourné de tous ces films pour être plus libres de faire le mien. ». Downsizing est précisément le type de film au scénario assez fou pour qu’il nous enchante, et pourtant un poil trop prévisible, car dès la bande annonce on a déjà tous une idée du chemin que notre chère race humaine va donner à cette technologie rapetissante.

Porteur d’un message

Dans ce film, l’ambiance est à la fin du monde, la surpopulation menace la planète ; et Paul Safranek, abandonné plutôt lâchement par sa femme, craque pour cette technologie révolutionnaire qui ne cesse de vendre le rêve dans une boîte. En effet les downsizés, ceux qui ont osé sauter le pas, s’insèrent religieusement dans ce processus qui est n’est pas seulement déshumanisant, mais à la fois porteur d’espoir pour l’humanité. Tout un passage est génialement consacré à la transformation génétique et à la procédure de rétrécissement, et on assiste alors à un enchaînement d’étapes minutieusement exécutées par une armada de scientifiques, qui consciente de ses vices, cherche à se contrôler davantage.

Est-ce que devenir petit allait réellement changer la donne ? Le parti-pris du film est de dire que non, et on retrouve tout naturellement dans le monde de Leisureland (le petit monde) les mêmes inégalités sociales, les mêmes désillusions amoureuses, et finalement les mêmes comportements profondément humains.

Reste que petit à petit, cette technologie se retourne contre elle-même, et c’est peut-être là que le film manque un peu de substance, car on ne peut s’empêcher de s’y attendre. Même si le personnage de Paul est délicieusement niais, les comportements caricaturaux de Dušan (interprété par un brillant Christoph Waltz) et de Ngoc Lan viennent appuyer la dystopie et rendent tout de même justice à des thèmes très importants évoqués tout au long du film, qui sont entre autres l’idée des droits pour tous, l’inégalité au travail, les divers impacts économiques et éthiques des grandes avancées scientifiques…

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Le spectateur aussi perdu que Safranek

La grande force du scénario se trouve dans le fait de lier comédie et drame dans un film qui ne se veut pas spécialement moralisateur, et qui traite d’une réalité peut-être pas si lointaine. Quelles sont nos véritables mesures face à des enjeux environnementaux encore trop laissés de côté ? Lorsqu’on sort de la séance pourtant, on ne sait pas sur quel pied danser, car d’une part les ellipses temporelles nous empêchent de donner vraiment corps à cette histoire, et il semble aussi que les décisions de Paul soient difficiles à comprendre, à admettre. Est-ce peut être qu’elles sont trop prévisibles ? Si l’apocalypse y est décrite comme plutôt sereine, on ne sait trop dans quelle direction il faut aller, et on ne peut s’empêcher de penser à la fin de ce film : tout ça pour ça ?

Reste que les images sont à la hauteur de nos espérances, et on se laisse volontiers absorber par la machine à rétrécir pour rêver un peu avec notre héros désabusé.

Matt Damon, dans une interview donnée à Konbini, nous conseille d’ailleurs à travers ce film de ne pas nous laisser rabaisser, et c’est sûrement la seule morale qui résumé parfaitement ce film audacieux et un peu déroutant.

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Clara Fulcheri