Berlinale : Railway Sleepers (Mon rot fai) – 1/8

Mon rot fai (Railway Sleepers) est le premier long-métrage du réalisateur thaï Sompot Chidgasornpongse. Né à Bangkok en 1980, il y étudie l’architecture et part ensuite à Los Angeles pour se consacrer au cinéma au California Institute of the Arts. Assistant réalisateur sur plusieurs films d’Apichatpong Weerasethakul, il est lui-même l’auteur d’une quinzaine de courts-métrages.

Étudiant aux États-Unis et légèrement nostalgique de son pays d’origine, Sompot Chidgasornpongse choisit la Thaïlande comme acteur principal de son film de fin d’étude.

Il a tourné entre 2009 et 2016 en s’embarquant à bord d’un train qui parcourt le pays du Nord au Sud. Il a ainsi capté sur différents trajets, de jour comme de nuit, sous le soleil ou sous une pluie battante, grâce à sa caméra curieuse mais toujours bienveillante, des instants simples mais assez forts de passagers locaux ou étrangers.

Dans ce documentaire, il s’agit de plusieurs voyages. En premier lieu, le voyage le plus évident est celui à bord de ce train si animé. Inaugurée en 1897 par le roi roi Rama V, la première ligne ferroviaire gérée par la Royal State Railways of Siam (RSR),  qui deviendra en 1951 la State Railway of Thailand (SRT), s’impose comme un signe de progrès et de modernité pour la Thaïlande. À travers les fenêtres, défilent villages, rizières, palmiers, laissant entrevoir une nature riche et excessivement présente. Sous une chaleur humide qui semble écrasante, les wagons sont tout de même animés, accueillant des passagers de tout âge et de toutes classes sociales. C’est ensuite ce deuxième voyage que le réalisateur nous offre à travers ce film, celui d’une traversée dans la société thaïlandaise. On y découvre des musiciens joyeux, des vendeurs de riz gluant vapeur et de petites bricoles ou une voyante mobile ventant la véracité de ses cartes astrologiques ; des familles de la petite bourgeoisie attablées au wagon bar local s’épanchant sur leurs soucis de cœur, ou encore de jeunes élèves curieux en voyage scolaire, qui participent au bouillonnement incessant de ces wagons bondés. Ce large éventail de personnages semble être à quelques détails près, une représentation assez large de la population thaïlandaise.

Ce film est bavard tout en étant très silencieux. Peu de passagers prennent la parole face caméra, mais celle-ci réussit tout de même à saisir des instants précieux de ces trajets assez banals.

La temporalité est brouillée, mais il ne semble pas essentiel d’identifier à quelle période correspond chaque plan ; en effet, on se sent dès les premières minutes, emporté dans une expédition contemplative, dont le bruit ininterrompu des rails nous berce jusqu’à la fin.

Flore Daïen